Dusty papers, 30 x 40 cm, techniques mixtes sur papier.
Les corps figurés des Dusty papers se situent dans un environnement indéfini. Nus, identifiables, ils se soumettent à un contexte incertain, le leur, celui du cadre, de la matière environnante… Ils se suspendent, s’arc-boutent, s’affirment dans l’attente, l’imminence ou le déroulement d’un événement dont on ne connaît ni la nature, ni le début, ni la fin. Ils sont eux-mêmes événement. Une composante de l’événement survient avec la matière, une matière terreuse, poussiéreuse qui submerge, éclabousse, dissout et menace. Les figures s’extraient, s’abandonnent, jouent et font corps avec la granuleuse poussière ocre cendre qui entre dans le cadre. Ce cadre définit un espace laboratoire, un terrain de rugby-ring de boxe où le hasard et l’aléatoire ont droit de cité. La matière incarne et désincarne la figure par effraction. La main retourne, plaque, imprime et éreinte la chair du papier sur la chaux murale désagrégée et la cendre collectée dans l’atelier. Murs et sol deviennent alors outils. La frontalité, le vis-à-vis, le travail à l’endroit, la visibilité, ne suffisent plus à produire sens et justesse. Ces figures éprouvées à l’envers entrent alors en résistance et assistent à leur propre métamorphose, à leur possible devenir dans une narrativité induite par la série. Métaphore d’un rapport entre le monde et soi. Il s’agit de ne plus vouloir ou pouvoir regarder ce qui se présente et se représente. Il s’agit de devenir étranger, de perdre conscience, d’espérer que la matière accidentelle et le poids du corps génèrent une ligne de faille déterminante et révélatrice. L’intention renaît alors, à force d’abandon et de dissipation forcés.
Jane Planson